Chers collègues,
Veuillez trouver ci-dessous un article que j'ai écrit à propos du
barrage de Kandadji au Niger.
Meilleures salutations,
Josh
--
Josh Klemm
Policy Director
International Rivers
Tel: + 1 202 492 8904
Skype: klemmjd
Twitter: @JoshKlemm
http://intlrv.rs/1Q44xfH
*Le barrage de Kandadji, un projet de la Banque mondiale, laisse les
communautés nigériennes à sec**
*3 fevrier 2016
par Josh Klemm, International Rivers
En 2012, la Banque mondiale a approuvé un prêt de $203 millions pour la
construction du barrage de Kandadji, au Niger. Cela a permis à une
douzaine de financiers de compléter le paquet financier de $785 millions
pour ce projet, qui sera situé sur le fleuve Niger. Les retards de
construction suite à un conflit avec la société engagée pour développer
le projet et les problèmes liés à la réinstallation des personnes
affectés, fait du Kandadji un projet à un avenir incertain.
Kandadji n’est pas n’importe quel projet; Kandadji a été présenté tel
qu’un projet qui produira 130 MW d'énergie nécessaire pour la capitale,
Niamey, et aussi d'exploiter le débit de la rivière qui permettra
d'élargir le potentiel d'irrigation du Niger. Le vice-président pour
l’Afrique de la Banque mondiale, Makhtar Diop, a décrit le projet comme
« un projet de développement transformationnel qui offrira un nombre
considérablement plus important d’opportunités aux communautés, plus de
nourriture, d’eau et d’électricité, et qui réduira la pauvreté dans la
région la plus pauvre de l’Afrique ».
La Banque mondiale a également pris soin de planifier le coût humain de
la construction du barrage. Conscient de l'héritage troublé des impacts
que tels projets ont sur les communautés déplacées
<http://www.internationalrivers.org/node/9010>, la Banque mondiale a
entrepris la tâche herculéenne de superviser le processus de
réinstallation de plus de 38.000 personnes situées aux alentours des
rives fertiles du fleuve. Le paquet de compensation comprendrait, la
réinstallation des agriculteurs traditionnels dans des nouvelles
maisons, offrir l’accès à l’irrigation, et le partage des revenus pour
les projets de développement local.
Le processus a commencé en 2012 avec la réinstallation d’une première
vague, d’à peu près 5500 personnes. Au début, beaucoup étaient
optimistes quant aux avantages promis relatifs au projet, mais cet
enthousiasme fut de courte durée. Alors que certains ont vu leurs
conditions de vie s’améliorer, les plans d'irrigation des communautés
réinstallées ont été mal conçus - sans surprise, la Banque mondiale
elle-même a noté que ce genre de système d'irrigation fonctionne
rarement en Afrique. La Banque mondiale a reconnu les difficultés du
processus de réinstallation, en notant que « la délocalisation en cours
pour la première vague reste considérablement retardée, et nécessitera
d'importantes mesures d'amélioration ».
Entretemps, de nombreuses communautés déplacées ont du mal à accéder à
l’eau potable, ainsi indiqué dans un nouveau documentaire du processus
de réinstallation
<http://www.gwiwestafrica.org/fr/kandadji-reinstallation-des-populations-quelle-lecons-tirees>.
Dans ce documentaire, Haoua Harouna, dans la communauté d'accueil de
Gabou, dit: « Cela me fait trois jours que je cherche de l’eau, en vain.
J’ai soif. Je n’ai pas trouvé à boire. Mes amis non plus. L’eau est
insuffisante pour la population. Ce problème dure depuis longtemps, et
même dans les villages voisins où nous nous approvisionnions avant,
l’eau est devenue de plus en plus salée. Elle est imbuvable ».
La première vague de réinstallation était prévue comme un essai pour un
groupe plus large de 33.000 personnes qui attendent leur tour, une fois
la construction du barrage commencée. Remplies d’anxiété, ces
communautés attendent d’être déplacées, comme retracée dans le
documentaire. « Nous avons vu ce qui s’est passé pendant la première
vague. Il y a eu beaucoup des fautes commises lors de la première vague.
Nous ne voulons pas que ces mêmes fautes se répètent avec nous. Déplacer
une population sans eau. Déplacer une population sans infrastructure.
Tout ça ce sont des choses que nous ne voulons pas voir se répéter chez
nous », dit Mohamed El Bachir, le chef de canton d’Ayorou, d’où la
population devrait être déplacée. « Nous ne savons toujours vers où nous
serons déplacés ».
Il n’est pas le seul. Des rapports informels ont soulevé des inquiétudes
qu'il n'y a pas suffisamment de terres pour réinstaller les 33.000
personnes restantes, et que toutes les bonnes terres de la région ont
été distribuées au cours de la première vague. Selon certaines sources,
le consultant qui aurait préparé le rapport de faisabilité ne s’est
jamais assuré que les terres arables mises à part par le gouvernement
seraient suffisantes. Ce serait un coup dur pour ces communautés qui,
depuis plusieurs années ont mis leur vie en suspens, en attente de la
réinstallation. Ce serait aussi une violation majeure de la politique de
la Banque mondiale, et compromettrait les efforts déployés récemment par
la Banque pour remédier les défaillances systémiques dans le traitement
de la réinstallation
<http://www.banquemondiale.org/fr/news/press-release/2015/03/04/world-bank-shortcomings-resettlement-projects-plan-fix-problems>.
En fin de compte, on ne sait pas où ces communautés iraient, par contre
il est très probable qu’ils finissent dans les bidonvilles de Niamey.
Les problèmes de réinstallation à Kandadji ont été aggravés par une
série de défis opérationnels qui ont mis en doute l’avenir du projet. Il
y a eu des retards dans l'identification d'une nouvelle entreprise pour
construire le barrage après que le gouvernement ait annulé le contrat
avec le promoteur russe, car ce dernier n'a pas respecté ses
engagements. En même temps, l’impatience des bailleurs de fonds se fait
sentir, dont les prêts restent non décaissés.
Face aux échecs persistants du gouvernement à atteindre les étapes clés
en matière de réinstallation, et en plein examen rigoureux du bilan de
réinstallation de la Banque mondiale
<http://www.icij.org/project/world-bank>, cette dernière explore
l’option de se retirer. Qu'est-ce que cela signifiera pour l'avenir du
projet, et même si d'autres suivent l'exemple de la Banque, tout cela
n’est pas clair. Dans tous les cas, le retrait serait une maigre
consolation pour les dizaines de milliers de nigériens dont les vies ont
été perturbés.
Entre-temps, la Banque mondiale soutient la préparation du barrage de
Fomi en Guinée près des cours supérieurs du Niger, plus de 2000 km en
amont de Kandadji. Cela va exiger qu’environ 50.000 personnes soient
déplacées du site, avec plus d'un million de personnes qui seront
touchées par le barrage en aval au Mali
<http://www.internationalrivers.org/fr/blogs/352/une-source-de-vie-pour-plus-de-1-million-au-mali-menac%C3%A9-par-les-plans-de-la-banque>.
Fomi ferait face au même ou plus grands défis que Kandadji.
Quoi qu’il en soit, la Banque mondiale semble incapable d'apprendre de
ses leçons durement apprises, et pour toutes les innovations de la
Banque, les communautés affectées par les barrages se retrouvent
habituellement dans des situations pires. Kandadji, un autre modèle de
barrage de la Banque mondiale devient de plus en plus moins attrayant.
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