Cameroun: Dr. Baba Malloum Ousman - «Il faut envisager la culture du
poisson en circuit fermé»
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Cameroon Tribune (Yaoundé)
INTERVIEW
22 Mai 2008
Publié sur le web le 22 Mai 2008
Jeanine FANKAM
Dr. Baba Malloum Ousman, directeur des pêches et de l'aquaculture au
MINEPIA, indique des pistes de relance.
A ce jour, quel est l'état du rapport entre l'offre et la demande en
matière de produit halieutique au Cameroun ?
L'offre en matière de produits de pêche se subdivise en deux
entités : la production nationale qui est évaluée à 180.000 tonnes
par an et les importations qui se situent à 120.000 tonnes.
Globalement l'offre se situe autour de 300.000 tonnes par an. La
demande peut tourner entre 280.000 et 320.000 tonnes par an. Ce sont
des chiffres qui datent de deux ans. Néanmoins, on peut signaler que
l'offre peut connaître des fluctuations. On enregistre des pertes au
moment du transport. Des pertes dues aux pourrissements notamment qui
peuvent être estimées à 30%. On peut donc comprendre le gap
enregistré entre l'offre et la demande qui crée souvent la rareté du
poisson sur le marché.
Le Cameroun peut-il réussir à rester indépendant des importations en
produits halieutiques ?
Le pays a un grand potentiel. Il peut développer sa propre production
à travers l'élevage du poisson. C'est ce que fait la plupart des
pays. C'est une oeuvre de longue haleine. Il faudra des années pour
couvrir les besoins nationaux. Il faut quand même reconnaître qu'il
est difficile pour un pays d'avoir une autosuffisance en matière de
produits halieutiques à partir des captures. Dans le monde, la pêche
à capture a atteint un summum, ce qui rend presque impossible à un
pays d'assurer ses besoins à partir de la pêche de capture. Ce qui
fait que le Cameroun sera toujours obligé de faire appel à un apport
extérieur.
Plusieurs centres d'aquacultures sont fermés depuis plusieurs années.
Que fait-on pour intéresser les jeunes aux activités de pêche ?
Nous les intéressons par la formation. Un recyclage est organisé
chaque année depuis 20 ans. Son impact est faible dans la mesure où
nous formons entre 30 et 45 jeunes. Depuis 2004, une formation
initiale sur financement PPTE est offerte pour faire d'eux des
pêcheurs professionnels. Des équipements leur sont aussi donnés sous
forme de crédit d'installation.
Mais les moyens manquent. C'est avec la crise économique des années
80 que ces centres ont été abandonnés. Avant 1985, ils avaient leurs
budgets et leurs personnels. La crise frappant de plein fouet, l'Etat
a arrêté les dotations en matériel et en ressources financières. Il y
a eu des départs massifs et ces centres se sont trouvés vidés de
leurs personnels et inopérants par la suite. Environ 16 stations
aquacoles et une quarantaine de centres d'alevinage sont dans cette
situation.
Où va-t-on trouver les moyens pour augmenter la production dans ce
secteur ?
Sur le plan technique, le problème ne se pose pas. Il faudrait
simplement une volonté politique. Il faudrait y mettre des moyens
substantiels.
A court terme, y a-t-il quelque chose à faire pour relancer la
production halieutique nationale ?
Dans un délai d'un an, on peut faire beaucoup de chose. Le manque
d'alevins est un goulot d'étranglement important. Il faut mettre des
ressources à dispositions pour que les centres aquacoles puissent
redémarrer et produire suffisamment d'alevins à mettre à la
disposition des paysans. Il existe au moins 5.000 étangs abandonnés à
travers le pays. On peut les relancer. On peut même introduire au
Cameroun l'aquaculture commerciale. C'est une culture de poisson dans
un circuit fermé. En 12 mois, et dans une surface comme une salle de
classe, on peut produire autour de 100 tonnes de certaines espèces de
poisson. Cela demande un investissement conséquent.
On a l'impression que les eaux camerounaises nourrissent davantage
les pêcheurs étrangers
La surveillance de nos eaux pourrait limiter le pillage. Plusieurs
bateaux étrangers viennent pêcher au Cameroun et emportent leurs
captures. Cela crée un manque à gagner considérable.